Aux États-Unis, la justice a finalement donné raison à une entreprise qui utilisait la photo d’un photographe sans son autorisation. Une décision qui scandalise la profession, qui craint que d’autres jugements soient rendus dans ce sens.

Cette décision a été rendue le 11 juin 2018 par le tribunal fédéral de Virginie aux USA. Un photographe, Russel Brammer, avait attaqué le Northern Virgin Film Festival pour violation des droits d’auteur, car l’une de ses photographies avait été utilisée sans son autorisation. La photo avait également été retouchée (rognée) et l’information sur le copyright avait été supprimée. Violent Hues Production, la société qui organise le festival, s’était défendue en indiquant que l’usage de cette photo respectait le fair use.

Aux États-Unis, pour que l’usage d’une photo soit considéré comme loyal (fair use), quatre éléments sont étudiés :

  • L’objectif de l’utilisation et la transformation de la photo
  • La nature de l’œuvre protégée
  • La part de l’œuvre utilisé
  • L’effet de cet usage sur les revenus de l’auteur

Dans ce cas précis, le tribunal fédéral a estimé que la photographie remplissait les critères du fair use. Elle était utilisée sur un site commercial, mais l’objectif de l’usage était non-commercial : la photo permettait d’informer le public sur le lieu du festival, elle ne faisait pas directement de publicité pour un produit et ne permettait pas, d’augmenter les revenus du festival. Les organisateurs n’ont utilisé qu’une partie de la photo, environ la moitié (elle a été croppée). Cette transformation du contenu original a également fait pencher la balance dans le sens du festival, car cette portion de la photographie suffisait à informer les internautes.

Deuxième point, les juges ont estimé que la photographie était factuelle et non créative. Il s’agissait d’une pose longue représentant une ville de nuit. La créativité du photographe a été reconnue (choix de la durée d’exposition, ouverture du diaphragme…) mais le fait qu’il s’agisse d’un lieu public (une rue) a suffit à trancher dans le sens du festival, car la photo n’était pas utilisée pour son côté créatif mais pour l’information qu’elle permettait d’apporter.

Le tribunal a également estimé que les organisateurs étaient de bonne foi : ils ont récupéré la photo sur Internet, sur un site qui n’indiquait pas que la photographe était protégée, ils ont donc pensé qu’ils pouvaient utiliser la photographie librement. Un jugement renforcé par le fait que les organisateurs aient accepté de retirer la photo lorsqu’ils ont appris qu’elle était protégée.

Enfin, le tribunal n’a pas été en mesure de prouver que le photographe avait obtenu des revenus moins importants du fait de l’usage de sa photographie sur le site du festival. La quatre critères du fair use était donc réunis pour rendre une décision favorable aux organisateurs. Ce verdict ne ravit évidemment pas les photographes, qui peuvent craindre un usage plus dérégulé de leurs photos sur Internet…